Le Fonds monétaire international (FMI) conseille au Sénégal de prendre des mesures audacieuses et rapides, qui puissent assurer la viabilité de ses finances publiques et réduire sa dette publique.
« À l’avenir, il est essentiel que les autorités [sénégalaises] mettent en œuvre des mesures audacieuses et rapides pour assurer la viabilité des finances publiques et placer la dette publique sur une trajectoire décroissante », recommande Edward Gemayel, un fonctionnaire du FMI, aux autorités du pays.
« La loi de finances 2025 représente une occasion cruciale pour le gouvernement de réaffirmer son engagement en faveur des réformes essentielles et de répondre aux défis structurels de longue date », signale M. Gemayel à la fin d’une mission effectuée à Dakar du 9 au 16 octobre.
Selon un communiqué de l’institution financière, il estime, au terme de la mission, que « des actions stratégiques pour renforcer la mobilisation des recettes domestiques » pourront « favoriser la discipline budgétaire et renforcer la confiance dans la gouvernance publique » au Sénégal.
Les actions à mener peuvent consister à rationaliser les exonérations fiscales, à « éliminer progressivement les subventions énergétiques et les transferts non essentiels », précise le communiqué en citant Edward Gemayel.
De telles mesures peuvent permettre au Sénégal de jeter les bases « d’un modèle de croissance plus inclusif, tiré par le secteur privé », selon le FMI.
Des révisions substantielles des données d’exécution budgétaire
La mission conduite à Dakar par M. Gemayel s’est penchée sur les ‘’conclusions préliminaires’’ du rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) sur les finances publiques sénégalaises, signale le communiqué.
Il rappelle que ce rapport couvre la période 2019-2024 et aborde les perspectives budgétaires du pays pour le reste de cette année.
La mission de l’institution financière visait à entamer l’évaluation des ‘’implications des révisions des données résultant de ce rapport pour les programmes soutenus par le FMI dans le passé, et le programme’’ de coopération que les deux parties sont en train de mettre en œuvre.
« Le personnel du FMI se félicite du rapport de l’IGF sur les finances publiques et de l’engagement du gouvernement en faveur d’une gouvernance solide et de la transparence budgétaire », affirme le communiqué en citant M. Gemayel.
« Les conclusions préliminaires indiquent des révisions substantielles des données d’exécution budgétaire pour la période 2019-2023 », poursuit la même source.
Le FMI ajoute que « ces révisions sont principalement attribuables à des investissements financés par des emprunts extérieurs et des prêts contractés auprès des banques locales ».
Le Sénégal continue de faire face à un environnement difficile
« En conséquence, signale l’institution financière, le déficit budgétaire et la dette publique pour cette période sont désormais estimés significativement plus élevés que les chiffres précédemment rapportés dans les lois de finances et de règlement ».
Cette remarque du Fonds monétaire international renvoie à l’accusation faite par les dirigeants actuels du pays contre l’ex-président de la République, Macky Sall, et certains de ses collaborateurs, sur la base du rapport de l’IGF.
M. Sall et les anciens ministres des Finances Amadou Ba (également ancien Premier ministre), Mamadou Moustapha Ba et Abdoulaye Daouda Diallo ont fait publier des « données erronées », concernant les comptes publics du pays, la dette et le déficit budgétaire notamment, selon le Premier ministre, Ousmane Sonko.
L’ancien chef d’État a rejeté cette accusation. « Je tiens à dire que ces propos sont faux, totalement faux. Attendons que la justice confirme ou infirme avant d’accuser les gens […] J’ai laissé un pays où les indicateurs étaient au vert. Le Fonds monétaire international a confirmé cela, un mois après que j’ai quitté le pays », a soutenu Macky Sall dans un entretien donné à l’agence de presse américaine Bloomberg.
Le déficit budgétaire devrait s’aggraver cette année
En attendant la « certification des conclusions de l’IGF par la Cour des comptes [du Sénégal], le personnel du FMI continuera à travailler en étroite collaboration avec les autorités dans les semaines à venir pour évaluer l’impact macroéconomique et définir les prochaines étapes », poursuit le communiqué de l’institution financière internationale.
Cette évaluation prendra en compte « d’éventuelles erreurs de déclaration dans les programmes passés et en cours soutenus par le FMI » au Sénégal, ajoute-t-elle.
Edward Gemayel relève, par ailleurs, que « le Sénégal continue de faire face à un environnement difficile, avec des signes de tensions accrues dans l’exécution du budget ».
« Le manque à gagner en termes de recettes […] a été confirmé à la fin de septembre [dernier]. Parallèlement, les dépenses sont restées élevées, principalement en raison d’une augmentation substantielle des dépenses d’investissement, comme le suggèrent les conclusions préliminaires du rapport de l’IGF », note M. Gemayel.
« En l’absence de mesures décisives sur les dépenses, le déficit budgétaire devrait s’aggraver cette année, dépassant l’estimation précédente de 7,5 % du PIB », lit-on dans le communiqué.
Le FMI précise que sa mission conduite par Edward Gemayel a rencontré le Premier ministre, le ministre de l’Économie, du Plan et de la Coopération, Abdourahmane Sarr, son collègue Cheikh Diba aussi, chargé des Finances et du Budget, de même que le ministre, secrétaire général du gouvernement, Ahmadou Al Aminou Lo.
APS Sénégal.