A Bamako, jusque dans les hautes sphères de l’Etat, on dénonce une coalition internationale cachée derrière les Groupes Armés Terroristes. Le président Tiani du Niger dit la même chose en les désignant comme « des sponsors de la déstabilisation et de l’asphyxie du Mali ». Une coalition serait donc constituée pour faire chuter le régime militaire de Transition du Mali et entrainer dans ce sillage les tenants du pouvoir de tous les autres pays membres de l’AES (Niger et Burkina Faso). Mais quelles seraient alors les composantes de cette coalition ? Et pourquoi en vouloir à ce point au Mali pour sponsoriser des acteurs de sa déstabilisation ?
D’abord la Mauritanie : considérée par Bamako comme une base arrière des Groupes Armés Terroristes (GAT). Selon des informations distillées par des sources proches du pouvoir àBamako, le JNIM a fait de la région de Kayes, notamment la forêt du Wagadou frontalière avec la Mauritanie, la base de formation de ses recrues qui sont par la suite disséminées à travers les régions de l’ouest, du centre et du centre-ouest du Mali. En effet, outre la région de Kayes et ses environs (ouest du Mali), la katiba du Macina – un des groupes armés les plus féroces du JNIM – est présente dans le Centre du Mali (Ségou, Bandiagara, San, Bla, Koro, Mopti…) et dans des localités qui sont situées à moins de 50km de la capitale, Bamako.
La frontière entre la Mauritanie et le Mali présente une certaine porosité qui facilite les mouvements des troupes armées terroristes entre les deux pays, se servant du territoire mauritanien comme une terre de refuge. Ce que les Autorités de Nouakchott ont toujours démenti sans convaincre leurs homologues de Bamako. La tension est devenue plus vive avec l’installation du régime militaire de Transition à Bamako.
En effet, le régime du général Assimi Goïta a toujours reproché à la Mauritanie un manque de sincérité dans la lutte contre le terrorisme. Les relations tendues ont même conduit à une guerre de quelques jours pour le contrôle d’une portion de terre, considérée par Bamako comme faisant partie de son territoire, mais occupée abusivement par des populations mauritaniennes qui couvrent l’activité criminelle de groupes terroristes.
Autant de raisons qui ont poussé les Autorités de Bamako à prendre la mesure de fermeture de leur frontière avec la Mauritanie.
L’Algérie : la lézarde dans ses relations avec le Mali est devenue un énorme fossé. En un mot, les deux vieux amis sont devenus des ennemis jurés. Selon des confidences recueillies à un haut niveau à Bamako, l’Algérie, qui est un ancien ami du Mali, a changé de position depuis que le Président du Mali (Alpha Oumar Konaré en ce temps-là) a refusé l’ouverture d’une représentation diplomatique du Polisario à Bamako, en décidant en même temps de geler la reconnaissance par le Mali de la République Arabe Sahraouie Démocratique (RASD) autoproclamée par le Front Polisario. Alors que c’est le même Mali (avec le Général Moussa Traoré comme Président) qui avait accompagné l’Algérie pour le parrainage de la RASD aux fins d’une reconnaissance solennelle par les Nations-Unies, au risque de fâcher le Maroc.
Le Président Alpha Oumar Konaré a voulu, par cette mesure de gel de la reconnaissance de la RASD, renouer avec le Maroc et intensifier en même temps les relations entre le Mali et la Libye (un autre pays que l’Algérie traite comme un ennemi). Les relations avec le Maroc et la Libye étant jugées bénéfiques pour Bamako, le Président Konaré a su jongler dans ce triangle de feu en tirant beaucoup profit de l’appui financier de Tripoli et de Casablanca.
Avec le Président ATT, ce fut le clash avec l’Algérie qui se sentait « trahie » par le Mali qu’il fallait « punir », selon l’expression en vogue dans des milieux sécuritaires et diplomatiques algériens. C’est ainsi qu’Alger aurait subtilement soutenu le réveil de la rébellion touarègue en 2006, obligeant le Mali à venir à la table de négociation sur le territoire algérien pour discuter avec les insurgés touareg. En se portant garant des accords (ceux de Tamanrasset) Alger faisait ainsi « une reprise en main » du Mali.
La France : Elle ne peut être absente du tableau des accusations de sponsorisation des Groupes Armés Terroristes formulées par le régime militaire de Transition au Mali pour des raisons connues de tout le monde. C’est donc de la lapalissade que de revenir sur le différend qui éloigne le Mali de la France.
L’Ukraine : Elle a été sollicitée par les Groupes Armés terroristes (GAT) pour combattre les milices russes engagées par Bamako aux côtés de l’Armée malienne. La guerre Ukraine-Russie se trouve ainsi transférée dans le Sahel en général et au Mali en particulier. D’ailleurs, dans les cerclesdu pouvoir au Mali, on soutient que l’implication de l’Ukraine serait passée par la France et justifierait le niveau élevé d’équipement des GAT actuellement en possession d’armes de dernière génération dont certaines seraient officiellement déclarées être livrées par la France à l’Ukraine. Vraies ou fausses, les accusations sont là, crues et têtues. Il faudra des arguments spécialement convaincants pour les balayer de la tête des Maliens qui croient dur comme fer en une connivence France-Ukraine contre le Mali.
Amadou Bamba NIANG
Laisser un commentaire