Capitaine du Havre à seulement 22 ans, le Sénégalais Arouna Sangante raconte son rôle et affirme avoir toujours eu ce goût pour les responsabilités. À 22 ans, le défenseur des Lions a porté à 41 reprises le brassard du HAC. Il compte 112 matches en pro et a inscrit 6 buts : 4 en L2, 2 en L1.
« Savez-vous que le milieu d’Arsenal Declan Rice est le seul joueur des Championnats du top 5 européen à avoir été plus de fois capitaine que vous, à votre âge, lors des cinq dernières saisons ?
C’est grand et symbolique, quelque chose qu’il a forgé. Ce sont aussi de grandes responsabilités. C’est « honorant » pour moi d’entendre ça. Je suis touché.
Est-on prêt à assumer ce type de responsabilités à 22 ans ?
Il n’y a pas d’âge. J’ai toujours eu le sens des responsabilités, même quand j’étais jeune. Je l’explique par tout ce que j’ai vécu. C’est privé. Mais par exemple, quand j’étais en U13, avec mon groupe d’amis, on ne savait pas trop où aller, quoi faire et j’étais celui qui tirait tout le monde vers le haut. Ça, je l’ai gardé. J’ai porté le brassard quand j’avais 13 ans. Ce leadership est en moi.
Des joueurs m’ont aidé, comme Abdoulaye Touré, André Ayew, Josué Casimir.
Mais votre manque d’expérience ne vous pénalise-t-il pas parfois ?
C’était plus difficile l’année dernière, je découvrais. J’ai appris ce que je devais faire, comment me comporter. Et si j’avais déjà ce côté paroles, il y a parler et transmettre par les bons mots. Des joueurs m’ont aidé, comme Abdoulaye Touré, André Ayew, Josué Casimir. Je ne pourrais pas citer un de leurs conseils exactement, mais ça m’a fait cogiter. Avec le Sénégal (il a été convoqué en sélection), Kalidou Koulibaly m’a pris sous son aile.
Comment réagit-on quand on reçoit cet honneur à 21 ans ?
C’était une décision de l’entraîneur (alors Luka Elsner), du staff et des joueurs, et elle a été annoncée en réunion. J’étais fier, c’était une récompense. Comme je ne l’avais jamais vécu en pro, c’était aussi un moment de stress. Mais j’ai accepté tout de suite. L’année où on monte (en 2023), on savait que Victor Lekhal ne voulait plus rester. Et le coach avait déjà commencé à me préparer.
Que ressent-on quand on entre en premier sur la pelouse ?
C’est un signe que tu envoies, tu es le chef de la meute. Mais que j’aie le brassard ou non, je suis toujours la même personne. Je parle beaucoup en avant-match et sur le terrain. Mais je ne suis pas quelqu’un d’impulsif.
« Si tu cries sur un jeune mais laisses passer sur un ancien, tu n’es pas crédible »
Est-ce délicat de donner des conseils ou des ordres à des anciens ?
Non, ce n’est pas dur, c’est être franc. Ça permet aussi de raffermir son autorité et ce n’est pas dérangeant, car c’est pour le bien de tout le monde. Et si tu cries sur un jeune mais laisses passer sur un ancien, tu n’es pas crédible.
Après sa nomination, le 1er juillet, Didier Digard vous a-t-il tout de suite confirmé comme capitaine ?
Ah oui, c’est quelque chose dont j’ai parlé avec lui en aparté dès son arrivée. C’était bien d’avoir cette première conversation, parce que c’est aussi quelque chose que je n’avais jamais vécu, un changement de coach en pro. Il m’a dit qu’il aimait ma détermination, ma rage.
Quelle est votre source d’inspiration ?
(Antonio) Rüdiger. Ç’a été mon coup de coeur depuis que j’ai commencé à évoluer à ce poste. C’est un malade, tout simplement. Il arrive à entrer dans la tête de tous ses adversaires et, aujourd’hui, c’est le plus dur à jouer. J’aime sa manière d’être, son agressivité, son vice aussi, sa technique. Et c’est un battant.
Votre entraîneur a aussi un caractère fort, le calmez-vous quand il pique des colères ?
Non, c’est son identité. Après, comme je vous l’ai dit, des fois, il faut être franc et si ça peut paraître dur de l’extérieur, c’est pour qu’on puisse grandir et avancer. Il ne faut pas mal le prendre.
Comment avez-vous géré les vives critiques dont il a fait l’objet ?
J’ai été blessé trois mois (aux adducteurs, d’octobre à janvier) sur cette période. Le plus que je pouvais faire, c’était être là au quotidien, essayer de rester proche du groupe. Je venais sur le banc à domicile, au soutien de mes coéquipiers, j’étais dans le vestiaire avec eux avant les matches. Et on échangeait beaucoup avec le coach. On s’entraide dans ces moments-là.
Je lis beaucoup, ce que je ne faisais pas avant. Mais être capitaine n’a rien changé à mon quotidien ni à ma vie.
Pour votre retour, à Reims (1-1, le 19 janvier), vous êtes impliqué sur l’ouverture du score puis égalisez. Ce but vous symbolise-t-il ?
À cette période-là, quand on prenait un but, c’était dur de revenir. Sur l’ouverture du score, où on s’était gênés avec André, c’était frustrant. Je lui ai dit : c’est rien, ça va passer. Il faut juste qu’on tienne, c’est sûr qu’on va revenir. Et après un tir, ce ballon me tombe dessus. Comme ça (sourires).
Comment un capitaine de 22 ans occupe-t-il son temps libre ?
Des fois je vais à la salle pour m’entretenir. Je joue à la Playstation, à Call of Duty ou Clubs Pro sur Fifa. Je prends un attaquant, il faut que je mette des buts (rires). La musique ? Avant, je faisais des sons. Mais j’ai arrêté, je ne prenais plus de plaisir. Je lis beaucoup, ce que je ne faisais pas avant. Mais être capitaine n’a rien changé à mon quotidien ni à ma vie.
Ce rôle peut-il toutefois « matcher » avec un âge où on a envie de profiter de la vie ?
J’ai toujours été très casanier. Rares sont mes amis qui me demandent de sortir, car ils savent comment je suis (rires) ! Mais bien sûr, ça peut m’arriver d’aller faire un resto.
Ce brassard a-t-il changé le regard des gens ?
On me demande un peu plus d’autographes. Mais je vais vous dire un truc : quand je sors, les gens ne me reconnaissent pas. Ce n’est pas facile, vu mon style vestimentaire. Je mets des sweats à capuche, je l’enlève une fois à l’intérieur, mais c’est plutôt rare que je sois reconnu. Sauf quand je sors avec Yassine (Kechta). Il n’y en a pas beaucoup des comme lui (il mime une queue de cheval) ! Je ne me cache pas, si on me reconnaît tant mieux, sinon, ça ne va pas me toucher.
Votre départ a encore été évoqué lors du dernier mercato. Auriez-vous eu le sentiment d’abandonner votre club, actuellement relégable ?
Si ça avait été un choix pour le bien budgétaire du club et celui du joueur, ça aurait été autre chose. Mais c’est sûr, ça aurait été dur. Depuis ma formation, je n’ai jamais quitté le HAC. »
Source : Le Soleil
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