Le 14 novembre 1981, au terme d’une visite d’amitié et de travail de deux jours en Gambie chez son homologue Dawda Jawara, le président Abdou Diouf annonçait la Confédération de la Sénégambie. L’affaire allait s’officialiser trois mois plus tard, avant sa dissolution 7 ans après.
Le chef de l’État sénégalais débarque à l’aéroport international Dakar-Yoff tout sourire et fier de sa mission gambienne. Ce 14 novembre 1981, Abdou Diouf est reçu sur le tarmac par son Premier ministre, Habib Thiam, des membres du Gouvernement et de l’Assemblée nationale, ainsi que la presse devant qui l’autorité tient instantanément un point.
C’est le journaliste Djib Diédhiou qui rendait compte des propos du président sénégalais, dans la parution du « Soleil » du lundi 16 novembre 1981. Du haut de ses 1,98m, impeccable dans son costume gris boutons croisés, Abdou Diouf détaille les termes de l’accord de la future Confédération qui allait être signé par les deux États, le 1ᵉʳ février 1982.
Les principales dispositions du protocole concernaient l’intégration des forces armées et de sécurité des deux pays, l’union monétaire et économique, la coordination des politiques d’affaires étrangères et de relations extérieures, la coordination sur le plan des communications, ainsi que la possibilité de coordonner dans d’autres secteurs souverains et de créer des institutions communes.
La Présidence, la Vice-présidence, le Conseil des ministres et l’Assemblée confédérale (40 parlementaires sénégalais et 20 Gambiens) devaient être les institutions de la Confédération. « Nous avons décidé que la présidence reviendrait au Sénégal, tandis que la Gambie assumerait la vice-présidence », finissait de préciser Abdou Diouf, qui était à Banjul depuis le 12 novembre pour une visite d’amitié et de travail.
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Le président sénégalais insistait notamment sur le fait qu’il n’y avait « aucune appréhension au sujet du projet de Confédération », fondant son propos sur l’enthousiasme des Sénégalais et des Gambiens, « peuples en avance sur leurs dirigeants en ce qui concerne le processus d’intégration ».
Dans la déclaration commune publiée in extenso dans la même parution du 16 novembre 1981 dans « Le Soleil », les deux chefs d’État ont souligné « leur parfaite identité de vues ». En son point 5, l’accord disait cependant que la Gambie et le Sénégal sauvegarderaient chacun son indépendance et sa souveraineté.
Ce point concentrait toutefois les suspicions, en raison de ce qui était admis comme l’acte fondateur du projet de Confédération. En juillet 1981, alors que le président gambien Dawda Kaïraba Jawara se trouve en Angleterre pour assister au mariage du Prince Charles (actuel roi) et de Lady Diana, il subit un coup d’État mené par Kukoï Samba Sanyang.
Le Sénégal envoie tout de suite un avion chercher le président gambien au Royaume-Uni, et déclenche l’opération militaire « Fodé Kaba 2 » pour chasser les auteurs du coup d’État et rétablir l’ordre constitutionnel en Gambie. Certains observateurs dénoncent une volonté d’annexion et indexent une attitude paternaliste du Sénégal.
Dans ses Mémoires, Abdou Diouf rappelle une anecdote à ce propos. Il se remémore qu’Abdoulaye Wade disait publiquement qu’il était inacceptable d’envahir un peuple souverain. « Quand nous nous sommes vus, Wade m’a dit : « Vraiment j’aurais agi comme tu l’as fait si j’étais à ta place. Mais si tu le répètes, je démentirai », confiait Abdou Diouf dans son livre.
Par ailleurs, on cite principalement le désenclavement de la Casamance parmi les raisons diplomatiques de la Confédération. L’histoire voudra que les premières manifestations insurrectionnelles officielles débutent en cette même année 1982, le 26 décembre précisément. Malgré les vagues, la Confédération tiendra jusqu’au 30 septembre 1989, date à laquelle elle est dissoute à l’initiative du Sénégal.
Mamadou Oumar KAMARA (Source Djib Diédhiou, « Le Soleil » du lundi 16 novembre 1981)
Source : Le Soleil
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