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Décès de l’artiste-peintre Séa Diallo: le dernier coup de pinceau d’un maître 

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Pensionnaire de la deuxième génération de l’École de Dakar, Séa Diallo est décédé le dimanche 2 février 2025. Artiste-peintre autodidacte, il savait explorer avec succès beaucoup de canaux esthétiques.

Face à l’existence éphémère, Séa Diallo a chevauché le temps pour déjouer la mort et fixer la trace éternelle d’une vie amenée à s’effondrer. Par la force et la portée de ses œuvres, l’artiste-peintre a su trouver une place au banquet des immortels. Disparu, le dimanche 2 février, il continuera de vivre à travers son art, qui a fini de lui assurer une existence intemporelle. Ou presque. Peintre complet, Séa était pourtant un autodidacte partagé entre liberté et spiritualité. Il y avait cette sorte de magie qui lui a très tôt ouvert le monde parfois hermétique de la création pour ainsi explorer avec succès beaucoup de canaux esthétiques. Avec ce peintre, les inspirations divines et spontanées donnaient corps à des créations, fruit d’un état d’âme instable.

Lequel est aussi à l’origine d’une création à profusion. Dans sa riche carrière, il a produit des centaines d’œuvres sur des thématiques variées (L’homme, La nature, Les guerres, L’enfance, Dieu, Le soufisme…). Chez Séa, l’art permet à l’humanité de se perfectionner. « L’art nous éduque. Il nous permet de nous améliorer. C’est une école pour l’homme », nous disait-il en 2020 lors d’une exposition rétrospective revenant sur ses 31 ans de carrière. Dans son travail, l’artiste-peintre faisait plonger dans une symphonie de couleurs et de formes où les variétés de pigments invitent, la plupart du temps, à une flânerie doucereuse au sein d’un univers exotique où l’élégance côtoie la convivialité. Entre des compositions acryliques de l’huile et de l’oxydation créant des ondulations, une fusion végétale et en métal, du grattage et du crayonnage… ses œuvres s’inscrivent dans une logique cohérente et exaltent toute la dimension artistique de l’homme.  «

C’était un artiste très passionné qui s’est formé en étudiant, en travaillant par lui-même, en fréquentant les ateliers d’artistes. Il a eu la chance d’être né dans les années 60, une période durant laquelle les arts visuels étaient très dynamiques », rappelle le critique d’art Alioune Ndiaye. Le peintre a réussi, ajoute-t-il, à se faire une identité artistique à travers ses personnages féminins « très élancés et bien dessinés, dont lui seul avait le secret ». En s’intéressant à sa société, au train-train quotidien de ses concitoyens, Séa Diallo était perçu « comme un peintre de la vie sociale ». Selon Alioune Ndiaye, c’est quelqu’un qui savait aussi interroger les croyances et les pratiques traditionnelles.

C’est en 1958 que Séa Diallo a vu le jour à Thiès. Tout petit, le défunt peintre montrait déjà des prédispositions pour une carrière dans le domaine de la création. À Kédougou où il a passé une partie de son enfance, il découvre un environnement différent, exotique. Fasciné par la culture des Bédik et des Bassaris, le garçon reçoit cette influence dans sa vision de l’art. Vite, ses premiers dessins décorent les façades de la maison familiale. Il attire l’attention. Caractère humaniste Déjà à l’école primaire, grâce à son talent de dessinateur, Séa est vite repéré et sollicité par des dames pour dessiner des modèles sur du tissu.

En déménageant à Saint-Louis, il découvre la vie dans l’Île. Sa proximité avec le Centre culturel français apporte une nouvelle dimension dans son art. Artiste autodidacte, celui qui est considéré comme pensionnaire de la deuxième génération de l’École de Dakar a très tôt senti toute la mine de créations qui dormait en lui. En 2020, lors de son exposition rétrospective à la Galerie nationale d’art, Séa Diallo annonçait sa volonté d’avoir un musée pour y mettre ses pièces pour la postérité. « Je veux montrer ce trésor auquel je me suis agrippé dans ma vie.

Il faut le jeter sur mon chemin parce qu’au fond, rien ne m’appartient », nous disait-il à propos de ses plus de 500 pièces datant de 1989 à nos jours qu’il gardait encore soigneusement dans le fond de son atelier. Une belle manière pour marquer son caractère humaniste, mais aussi sa générosité.  Artiste engagé, Séa Diallo était à l’aise avec toutes les disciplines du champ de la création. Chez lui, il n’y a pas de frontière entre sculpture et peinture, poésie et musique. Il s’agit d’un ensemble qui se complète, mais qui ne se sépare pas.

En 2020, il confiait dédier les créations de sa fin de carrière à la spiritualité. « À 62 ans, ce qui m’intéresse maintenant, c’est la spiritualité », soutenait-il. Avec ses séries à l’image de « Les quêtes soufies », il cherchait ainsi à faire l’imprégnation de la jonction entre tous les éléments de l’univers (règne végétal, animal ou astral) pour jouer la symphonie. « J’essaie de réconcilier l’homme avec son environnement, et avec Dieu. Parce qu’il est en conflit avec Dieu. Il ne suffit pas seulement d’aller à la mosquée pour prier. Dès que vous arrivez à penser que vous pouvez faire du mal à quelqu’un, vous devez vous remettre en question. L’homme est le remède de l’homme. Quelle que soit l’adversité, on ne doit pas attaquer son prochain, qui est un trésor qui appartient à Dieu », soulignait-il. Inhumé, hier, Séa Diallo repose désormais au Cimetière de Yoff.

Source : Le Soleil

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