Faut-il brûler les comités de santé ?
Pourquoi un personnel administratif vieillissant sans formation diplômante (entre 50 et 70 ans) dans les centres de santé, alors que la jeunesse bien formée est en quête permanente d’emploi? Il ne faut surtout pas poser cette question aux médecins-chefs des districts sanitaires puisqu’ils répondront, à l’unisson, ne pas avoir d’emprise sur le recrutement relevant plutôt des comités de santé, avec lesquels la collaboration n’est pas toujours des meilleures, surtout en ce qui concerne la gestion financière et comptable. Une situation qui nécessite une plus grande attention du Ministère de la Santé dans la dynamique de l’ère de rupture tant prônée.
Une intrusion dans le secteur médical permet de comprendre que la plupart des centres de santé sont gérés par des comités, présentés comme des représentants de la population locale. En effet, les membres desdits comités sont élus par les associations de quartiers pour un mandat de trois ans, renouvelable.
Les préfets et sous-préfets, en charge de l’installation officielle desdits comités n’en ont aucun contrôle. C’est beaucoup plus une affaire des maires qui trouvent en ces comités une belle occasion de caser leurs fidèles militants dans les centres de santé relevant de leur compétence territoriale.
Ce comité, une fois installé, gère le centre de santé communal, notamment en ce qui concerne la logistique, le matériel médical et même les finances. Une grande partie du personnel, recrutée par ledit comité, travaille à côté des fonctionnaires affectés par le Ministère de la Santé. Ce qui implique une cogestion entre le comité de santé et le premier responsable affecté sur place par le Ministère de la Santé, notamment le Médecin-chef du district sanitaire. Une collaboration qui n’est pas des meilleures, comme le soulignent des médecins que nous avons rencontrés.
Effectivement, les Médecins-chefs des districts sanitaires vivent un malaise profond en ce qui concerne la gestion des finances constituées de recettes issues des prestations médicales et perçues sur la base de tickets fournis par le comité de santé. Des tickets vendus par des agents recrutés par ledit comité dont les dirigeants se tapent des indemnités mensuelles qui dépassent parfois le traitement des jeunes médecins en activité dans le centre de santé.
Parfois, des circuits hors de contrôle des médecins-chefs sont mis en place dans la commercialisation des tickets de consultation et autres prestations, entrainant une fuite de recettes. Il n’est pas rare aussi que les employés, eux-mêmes, organisent à leur tour leur propre circuit pour se partager une partie des recettes avec le comité dont le trésorier, à tort ou à raison, se contente du peu qui lui est versé au nom de la caisse.
Naturellement, le premier effet d’entrainement de ces pratiques est que, du côté investissements, ça ne bouge souvent pas. Pour preuve, des centres de santé n’ont connu aucune évolution en termes d’infrastructures et de conditions de travail du personnel de santé, pendant que d’autres, moins fréquentés et nés sur les flancs du premier centre de santé, se modernisent et s’agrandissent avec le peu de recettes engrangées. Il y a donc problème.
Gestion financière et ressources humaines : des dysfonctionnements préoccupants
C’est parce que la gestion des comités de santé laisse à désirer au point que des vieilles femmes et de vieux hommes, employés depuis plus de dix ans, voire 15 ans, avec des salaires misérables de 40 000 à 60.000 FCFA, sans évolution au fil des ans, ne demandent jamais d’augmentation et pourtant, malgré la hausse du coût de la vie, restent accrochés au poste au-delà même de l’âge de départ à la retraite. C’est parce qu’ils trouvent le moyen de compenser la faiblesse de leur traitement salarial.
En effet, le mouton broute là où il est attaché. En d’autres termes, connaissant parfaitement le mode de fonctionnement du centre de santé, ils ont développé des circuits d’enrichissement illicite en détournant les recettes par divers procédés. Ce qui permet à certains, parmi eux, de construire une grande maison, d’entretenir un train de vie qui pouvait alerter sur leurs pratiques ou de soutenir les études de leurs enfants à l’étranger. C’est pourquoi ils sont toujours aux postes, même si, avec l’effet de l’âge, ils ne garantissent ni assiduité ni ponctualité. Qui est fou pour se débarrasser d’une si bonne situation de rente !
M. le ministre de la Santé Ibrahima Sy se trouve donc interpellé pour voir de plus près le fonctionnement des comités de santé aux fins d’un meilleur contrôle de leurs activités. Et surtout de mettre à la retraite ce personnel vieillissant pour faire place à la jeunesse dont le chômage est devenu trop préoccupant.
A.A.N
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