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Sénégal : la Primature à l’épreuve du populisme ?

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Loin des standards républicains établis depuis 1960, le rôle de Premier ministre semble connaître une inflexion inédite sous l’ère actuelle. Une dérive inquiétante pour une fonction historiquement marquée par la retenue, la loyauté et le sens de l’État.

Depuis l’indépendance, le Sénégal a vu défiler dix-sept Premiers ministres  en dehors de l’actuel occupant du poste, Ousmane Sonko. Tous, quelles que soient leurs obédiences politiques, ont respecté un principe fondamental : incarner la rigueur républicaine. Garder le cap de la continuité étatique. Être des courroies de transmission loyales de la volonté présidentielle, sans jamais céder aux tentations de l’agitation politicienne.

La fonction exigeait et exige encore une posture faite de discrétion, de maîtrise de soi, et de fidélité à l’institution. Les Premiers ministres successifs se sont ainsi tenus à distance des controverses, évitant soigneusement toute prise de parole intempestive ou attitude susceptible de compromettre l’équilibre des pouvoirs. Ils savaient que leur rôle n’était pas d’occuper le devant de la scène, mais de garantir l’efficacité de l’action gouvernementale dans le respect strict de la hiérarchie républicaine.

Jamais un chef du gouvernement ne s’était permis de contester publiquement une décision judiciaire, de dénigrer les institutions ou d’alimenter des tensions avec la présidence. Jamais la Primature n’avait été transformée en tribune de règlements de comptes ou de provocations.

Aujourd’hui, une nouvelle posture semble émerger, brouillant les repères. La fonction, autrefois marquée par la technicité et l’équilibre, devient l’instrument d’un discours plus clivant, plus direct, parfois même populiste. Faut-il s’en réjouir au nom de la « proximité avec le peuple » ? Ou s’en inquiéter pour ce qu’elle révèle d’une mutation profonde dans la culture républicaine sénégalaise ?

La question est posée : le Premier ministre peut-il être à la fois pilote de l’action publique et figure contestataire du système qu’il sert ? Cette tension entre loyauté institutionnelle et posture oppositionnelle interroge. Car derrière cette évolution se profile une remise en cause du sens même de l’État.

Si cette rupture se confirme, elle marquera un tournant. Non pas simplement politique, mais structurel. Car la Primature n’est pas un espace de provocation. C’est un lieu d’arbitrage, de gravité, et de synthèse. C’est là que s’élabore la stabilité gouvernementale. C’est là que se joue l’autorité de l’État dans ses formes les plus sensibles.

Dans un contexte national et international exigeant, il est plus que jamais nécessaire de préserver la dignité des fonctions républicaines. De résister aux dérives de l’instant. Et de rappeler que le respect des institutions ne relève pas d’un formalisme désuet, mais d’un engagement fondamental pour la pérennité de notre démocratie.

A.A.N

SenQuotidien

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